Chaque lundi, la Nouvelle société savante de Marseillologie vous propose 2 600 signes sur l’Agora de Marsactu pour évoquer l’actualité politique, économique, sociale ou culturelle de la ville.
Cette semaine, la publication des mémoires de l’ancien maire.
Alors que le prétoire du tribunal de Marseille résonne des réquisitions contre les frères Guérini et tandis que le conseil municipal débat du premier budget de la nouvelle majorité, l’ancien monde frappe à une autre porte avec cette publication de Maintenant, je vais tout raconter signé Jean-Claude Gaudin. Le bilan n’est-il pourtant pas déjà établi ? On écoute quand même, une dernière fois, la sempiternelle évocation de la politique d’antan dont on se pince pour vérifier qu’elle a bien existé ainsi, avant de se mordre en constatant qu’elle est loin d’avoir disparu. Monsieur le maire honoraire de Marseille fait donc la tournée des médias parisiens et des bonnes feuilles sont publiées ici et là. On s’en contentera.
50 ans de vie publique et 122 ans de mandat, donc, conseiller municipal de Marseille élu pour la première fois- benjamin – en 1965, député (1978-89), conseiller général (1982-88), maire de secteur (1983-89), Président du conseil régional (1986-98), Sénateur (1989-95, puis 1998-2017) dont vice-président (2014-17), Ministre de l’aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration (1995-97), Président de la Métropole (2016-18) et Maire de Marseille (1995-2020), ouf ! Et que retenir ? Une compilation d’anecdotes trop connues qui le mettent en scène à côté de quelques puissants ; un rapport personnel à la chose publique ; un clientélisme assumé dès lors qu’il correspond à une définition « guériniste » (« rendre service aux gens ») ; un bilan de politiques publiques soit par petites touches (une usine qui échappe à la délocalisation), soit à traits grossiers (Euroméditerranée, le tourisme, un front de mer flagship) sans qu’on puisse apprécier son véritable apport de l’action publique qu’il a conduit. La médiocrité de sa politique se mesure aussi à la difficulté de la qualifier parmi le paysage des expériences d’économie politique de la France urbaine : ni sociale-démocrate par manque d’appétence pour la redistribution, ni néolibérale par incompétence de la puissance publique et manque d’attractivité pour les intérêts privés, ni conservatrice mais tout de même un peu, ni populaire, bien sûr, jamais.
Les interviews qu’il a données la semaine dernière résume la trace qu’il gardera, tendue vers une matinée au crépuscule de son mandat : le 5 novembre 2018. Sa responsabilité dans la politique de l’habitat indigne ne lui vaut pas encore une mise en cause judiciaire, mais la procédure avance. Ce drame qui « le hante tous les jours » selon sa formule rabâchée résumerait-il la vie politique de celui qui la lui a consacrée ? Cruel, peut-être, mais si juste.