Chaque lundi, la Nouvelle société savante de Marseillologie vous propose 2 600 signes sur l’Agora de Marsactu pour évoquer l’actualité politique, économique, sociale ou culturelle de la ville.
Cette semaine, la « culture » pris dans les luttes, les tribunes et les motions.
La culture que l’on confine, ses lieux que l’on occupe, ses tribunes que l’on signe, ses motions que l’on retire. En quelques jours, la culture revient sur scène et on se demande si ce n’est pas pour y mourir pour de bon. Trois moments, trois espaces, trois types d’acteurs qui donnent à la « culture » sa pleine mesure polysémique oscillant entre saveur de luttes et odeur empuantie.
C’est d’abord l’occupation des théâtres qui s’inscrit dans le mouvement national. Au Merlan, à la Criée ou au Frac depuis un mois, on réclame, non pas la réouverture des lieux culturels, mais l’abrogation de la réforme de l’assurance chômage qui frappe durement les intermittents du spectacle, structurellement exsangues, et encore plus fragilisés – si la chose est possible – par les conséquences de la pandémie et l’annulation des spectacles.
De la précarité, il n’en est pas question dans le second mouvement de la polysémie culturelle marseillaise. Soixante-sept personnalités locales des mondes de l’art et de la culture, signent une tribune à la gloire de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui a fait preuve de « sa volonté, toujours en acte (sic), de se mettre au service de la culture et des acteurs culturels dans toute leur diversité » (sic, sic et re-sic). Ne boudons pas notre plaisir et continuons la lecture : « la Région ne s’est jamais contentée de simples engagements » – ce qui aurait été dommage – mais « a agi pour le bien commun » – rien que ça – et « elle continuera de le faire pour que le retour à la vie culturelle soit assurée plus vite ». Elle le continuera pour que vive la culture et que la culture vive si, et seulement si, bien sûr, les suffrages se portent sur la majorité sortante qui a « mise à l’honneur la culture ». « Pour toutes ces raisons » – et pour d’autres, sans doute – la tribune se conclue par un « souhait » : le « maintien de ces orientation durant le prochain mandat régional ».
On croyait avoir vu la droite locale à la manoeuvre dans cette grossière instrumentalisation politique de la « culture » et on n’avait pourtant rien vu. On apprenait en fin de semaine que le groupe majoritaire (LR) à la Métropole avait l’intention de présenter un « appel à l’expression d’une politique culturelle de l’enracinement et de l’amour de la France » (c’est son titre gorafique). Ce « torchecul » comme le qualifie Jean-Marc Coppola coche tous les mots clés de l’offensive maurrassienne au nom de la toujours sacro-sainte « culture ». Devant le tollé, la motion a finalement été retirée avant qu’on en connaisse les porte-plumes. Mais décidément, sale semaine pour la culture.