L’OM, la crise permanente, la ville


Chaque lundi, la Nouvelle société savante de Marseillologie vous propose 2 600 signes (repris sur l’Agora de Marsactu) pour évoquer l’actualité politique, économique, sociale ou culturelle de la ville.

Cette semaine la crise permanente qui secoue l’Olympique de Marseille et son intrication dans la ville 

Au moment d’écrire ses lignes, l’OM n’a pas encore logiquement perdu contre son rival parisien – c’était hier ne me dites rien – et n’a pas encore été vendu à un prince saoudien pour une somme avoisinant le total des dépenses d’investissement de la ville (450 M€). En revanche, son centre d’entraînement a été envahi samedi dernier par une centaine de supporters sous les yeux effarés des salariés du club, de l’entraineur de l’équipe première et des joueurs. Un entraîneur qui devait donner sa démission au cours d’une conférence de presse avant de se voir signifier sa mise à pied par sa direction. Si certains observateurs aiment à qualifier ces situations de « lunaires », avouez qu’on était là plus proches de la planète Mars (12e arrondissement). 

En milieu de semaine, et sans qu’aucun de ces éléments ne soit liés, le maire annonce son intention de vendre le stade Vélodrome « parce qu’il nous coûte trop cher » . Une position défendue lorsqu’il présidait le groupe d’opposition socialiste à la mairie lors de la dernière mandature. Pour mémoire, le stade fut rénové entre 2011 et 2014 sous l’empire du régime des partenariats publics-privés : financés par Bouygues Construction via sa filiale Arema (105 M€), l’Etat (30 M€) les collectivités locales (80 M€, dont 45 par la seule ville), pour un total de 270 M€ (soit environ 90 fois le budget de la ville dédiée à l’entretien des écoles). PPP oblige, la ville verse un loyer à Arema pendant 31 ans. Pour la faire vite, le coût réel net pour la municipalité s’élèverait à 551 M€ sur 31 ans, soit 18 M€ par an. La redevance de 4 M€ demandée à l’OM pour occuper le stade, dont il gère l’exploitation depuis 2019 se révèle bien maigre. 

Ces rebondissements, croisés et concentrés sur une semaine, soulèvent à nouveau la place de l’équipe de foot dans la ville. Fortement associée dans les imaginaires, elle est toujours discutée par celles et ceux, dont le cortège grandit, qui observent cela avec détachement sans qu’il n’en coûte à leur identité marseillaise. Passé l’antienne selon laquelle il y aurait autant d’abonnés à l’OM qu’aux théâtres, reste ce curieux paradoxe d’une institution à la fois inextricablement liées à la ville (dans les stéréotypes qu’ils partagent : exubérance et passion irrationnelle, fierté gonflée, instabilité chronique) et profondément détachée d’elle, par lointaine indifférence pour une partie des habitants, par progressif dépit amoureux chez d’autres, déçus de voir le club de leur enfance prendre un virage néo-mangérial macronien sous pavillon américain avant donc de passer sous bannière saoudienne. Lunaire.