Le mot en G-

Chaque lundi, la Nouvelle société savante de Marseillologie vous propose 2 600 signes sur l’Agora de Marsactu pour évoquer l’actualité politique, économique, sociale ou culturelle de la ville.

Cette semaine, les réactions à un article paru dans LeMonde Campus sur la gentrification par des classes « créatives » désargentées

Les suites des élections territoriales, le maire chez FO, l’anniversaire de ce mythique 3e tour et à cette occasion, des entretiens du maire dans la presse… On y reviendra mais plus tard puisqu’il faut s’attarder sur cet article et son flot de commentaires (critiques) qui l’ont accompagné.

Pour le Monde Campus, Jean-Laurent Cassely titre : « Soleil, loyers modérés et liberté : Marseille attire la jeunesse créative et fauchée ». Journaliste, essayiste, l’auteur « consacre son travail aux modes de vie et aux valeurs des classes supérieures urbaines ainsi que sur la nouvelle société de consommation ». Il est aussi l’auteur du « Manuel de survie à Marseille » et fut l’un des invités du 2nd Congrès mondial de marseillologie au MuCem comme chacun s’en souvient. C’est donc un fin connaisseur de la jeunesse diplômée et un de nos compagnons de route qui s’en va explorer une réalité complexe : celle des néozarrivants qu’on appelle depuis le roman d’Hadrien Bels, les « Venants ». Celles et ceux venu·e·s d’ailleurs apportant non pas leurs origines dans leurs bagages, mais des pré-conceptions de leur terre « d’adoption ». Adoption forcément contrariée, donc. 

Du point de vue de l’analyse sociologique, de l’enquête journalistique ou de l’activité militante, le terrain est miné. Et pourtant son auteur avance à couvert : Marseille est transformée par l’arrivée tous les ans de 10 000 diplômé·e·s de filières culturelles au sens large, de l’artiste au consultant en communication. C’était l’hypothèse qu’il défendait pour la Fondation Jean-Jaurès où, avec Sylvain Manternach, il expliquait la victoire du Printemps Marseillais par la présence d’une « gauche culturelle, regroupant les professions culturelles et intellectuelles des secteurs public et associatif, les jeunes diplômés et la vague des néo-Marseillais ».

On ne reviendra pas sur les tenants de sa démonstration sinon pour dire qu’elle est stimulante. On pointera simplement l’incroyable flots de commentaires (852 commentaires et 186 partages sous la mention de l’article dans la page Facebook « Marseille à la loupe » tenue par Mathieu Grapeloup) et son lot de critiques parfois violentes portant sur le fond et le ton de l’article. On lui reproche des manques sur la question de la précarité et son usage des stéréotypes. Et si, au fond, ce qui soulève autant de passion ce ne serait pas la mise en perspective de la gentrification à Marseille : son avancée, ses apories, ses effets, ses limites, son absence ou les luttes qu’elle engendre. Ce mot en G. qui s’il n’est pas toujours prononcé vaudrait encore la peine d’être questionné.