En bulldozer, à l’assaut de la métropole

Chaque lundi, la Nouvelle société savante de Marseillologie vous propose 2 600 signes sur l’Agora de Marsactu pour évoquer l’actualité politique, économique, sociale ou culturelle de la ville.

Cette semaine, l’intervention spectaculaire de la municipalité dans la crise des déchets.

Il est 21h05 ce dernier jour de janvier quand le maire de Marseille décide de taper du tweet sur la table

[emoji point rouge] « À situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle ! Face à des dizaines d’incendies de poubelles et aux alertes météo, j’ai informé ce soir le @Prefet13 que je vais déroger au droit des collectivités à la répartition des compétences entre la Ville et la Métropole. »

Après 13 jours de conflits et 3 000 tonnes de poubelles amoncelées, la municipalité décide d’intervenir dans un conflit social qui ne la concerne pas sur le strict plan des compétences réglementaires. Tandis que les conditions climatiques faisaient craindre un nouveau désastre écologique et que les départs de feu se multipliaient, la situation d’urgence a commandé à la ville de sortir de son rôle de spectateur dans lequel la loi la confine. On le sait, la querelle entre les syndicats et la Métropole dure depuis septembre autour de l’application des 35 heures qui contraint les agents de la propreté à travailler davantage. L’accord de décembre n’avait pas convaincu FO et le bras de fer était reparti de plus belle il y a 2 semaines.

Pour la mairie, l’occasion est symptomatique de l’impasse institutionnelle dans laquelle sont piégées les relations avec la Métropole alors que se négocie au Parlement, la réforme de sa gouvernance. La ville souhaitait profiter du volet « chicaya » du plan Macron pour réclamer un rapatriement de compétences, dont celle de la collecte et de la gestion des déchets si sensible sur le plan électoral. La loi 3DS, qui entre dans sa dernière ligne droite avec son examen cette même semaine par la commission mixte paritaire, en constituait le véhicule législatif idoine. Las, les dispositions ne changeront pas. Benoit Payan ne pourra compter que sur le rapatriement de la responsabilité limitée de la propreté des rues, échouant ainsi dans sa reconquête des pans perdus de « souveraineté ».

Sans doute informé de cet échec sur le front de la réforme, il a choisi le terrain du rapport de force politique sur le terrain, sans un mot ou presque sur le fond du conflit social, et recouvrant par le tonnage de déchets ramassés, le reproche de briseur de grève qui pourrait lui être adressé. Et ses adjoints et la maire de secteurs d’assister aux spectaculaires interventions de bulldozers manifestant la puissance du pouvoir municipal face à la saleté accumulée par l’incurie de la métropole, ainsi que le défi institutionnel face aux barrières de compétences érigées par la loi. Depuis, un accord a été trouvé, mais cette fois, promis, on ne présumera pas de son avenir.